Petit rappel de la définition de l’infection nosocomiale par le Conseil d’Etat

Un patient atteint d’une maladie chronique de l’intestin, bénéficiait d’une colectomie impliquant la réalisation d’une colostomie, réalisé le 1er mai 2009 à l’hôpital Saint-Louis de l’Assistance publique des hôpitaux de Paris (AP-HP).

Le 6 mai suivant, il présentait une rétractation de sa colostomie ce qui provoquait une péritonite aiguë généralisée nécessitant une nouvelle intervention en urgence et lui laissant de nombreuses séquelles.

Par un jugement du 10 juillet 2018, le Tribunal administratif de Rennes jugeait que cette péritonite revêtait le caractère d’une infection nosocomiale et mettait l’indemnisation de la victime à la charge de l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM).

L’ONIAM interjetait appel de ce jugement et par un arrêt du 2 avril 2020, la Cour administrative d’appel de Nantes annulait le jugement de première instance en tant qu’il mettait une somme à la charge de l’ONIAM et rejetait les conclusions indemnitaires présentées par le patient  contre l’ONIAM.

La Cour administrative d’appel considérait que la péritonite présentée par le patient le 6 mai 2009 ne revêtait pas le caractère d’une infection nosocomiale au sens des dispositions du texte précité. Pour ce faire, elle se fondait sur ce que cette infection avait pour cause directe la rétractation de la colostomie , accident médical non fautif qui est au nombre des complications susceptibles de survenir lorsqu’une colostomie est réalisée sur un patient souffrant de la pathologie dont le patient était déjà atteint avant son admission à l’hôpital.

Sur pourvoi de la victime, le Conseil d’Etat sanctionne cette décision qui revêt selon lui une erreur de droit.

Rappelant les termes de l’article L. 1142-1-1 du code de la santé publique, la Haute juridiction rappelle une jurisprudence bien établie aux termes de laquelle doit être considérée comme une infection nosocomiale, au sens de ces dispositions, une infection survenant au cours ou au décours de la prise en charge d’un patient et qui n’était ni présente, ni en incubation au début de celle-ci, sauf s’il est établi qu’elle a une autre origine que la prise en charge.

L’arrêt précise que l’infection doit être regardée comme présentant un caractère nosocomial du seul fait qu’elle était survenue lors de la prise en charge de la victime au sein de l’établissement hospitalier, sans qu’il ait été contesté devant le juge du fond qu’elle n’était ni présente ni en incubation au début de celle-ci et qu’il était constant qu’elle n’avait pas d’autre origine que cette prise en charge.

Le Conseil d’Etat précise également qu’il n’y a lieu de tenir compte de ce que la cause directe de cette infection, à savoir la rétraction de la colostomie, avait le caractère d’un accident médical non fautif ou avait un lien avec une pathologie préexistante.

CE, 5ème – 6ème ch. réu., 1er février 2022, n°440852

De la possibilité de cumuler une indemnisation allouée au titre d’un accident de la circulation et celle allouée au titre de l’accident médical survenu ensuite, dans la limite du préjudice global.

Mme X, circulant à cyclomoteur, avait été victime d’un accident de la circulation impliquant un autre véhicule. Souffrant de diverses lésions et fractures des membres inférieurs, elle avait été prise en charge au sein du centre hospitalier d’Annecy qui avait repoussé au lendemain l’opération chirurgicale de réduction des fractures et avait seulement assuré, dans l’attente, une traction de la jambe. Malheureusement, la victime était découverte dans un état de coma le lendemain matin par l’équipe médicale en raison d’une embolie graisseuse survenue pendant la nuit

Mme X avait alors introduit un recours en indemnisation devant une juridiction civile sur le fondement de la loi de 1985 relative aux accidents de la circulation mais son droit à indemnisation s’était alors vu réduit de moitié en raison d’une faute de conduite qui lui était imputée par la cour d’appel de Chambéry.

Mme X avait également saisi le juge administratif d’un recours en indemnisation. Le Tribunal administratif de Grenoble avait partiellement fait droit aux demandes indemnitaires de Mme X qui avait fait appel, ainsi que le Centre Hospitalier d’Annecy. La Cour d’appel de Grenoble annulait le jugement, retenait la responsabilité de l’établissement en raison du retard de prise en charge et du défaut de surveillance, qui, sans être directement à l’origine de l’embolie graisseuse, lui avait fait perdre une chance de 50% d’échapper aux séquelles qui en étaient résulté.

Mais la Cour d’appel, après avoir évalué, en tenant compte de ce que la responsabilité du centre hospitalier n’était engagée qu’à hauteur de 50% des différents postes de préjudices subis par Mme X, le montant global des sommes dues à cette dernière par l’établissement de santé, déduisait de ce montant les sommes qui lui avaient été allouées la cour d’appel de Chambéry .

Mme X interjetait un pourvoi en cassation.

La Haute juridiction rappelle dans son arrêt que  lorsque la faute commise par un établissement public de santé dans la prise en charge de la victime d’un accident commis par un tiers engage sa responsabilité à l’égard de cette victime, la réparation qui incombe à l’établissement de santé est indépendante du partage de responsabilité susceptible d’être prononcé par la juridiction saisie d’un litige indemnitaire opposant la victime et le tiers auteur de l’accident. Par suite, si cette dernière juridiction a condamné le tiers à indemniser la victime de tout ou partie de ses dommages corporels, cette somme n’a pas à être déduite du montant que l’hôpital doit verser à la victime en réparation de la faute du service public hospitalier. En revanche, la décision du juge administratif ne pouvant avoir pour effet de procurer à la victime une réparation supérieure au montant du préjudice subi, il y a lieu, pour celui-ci, de diminuer la somme mise à la charge de l’hôpital dans la mesure requise pour éviter que le cumul de cette somme et des indemnités que la victime a pu obtenir devant d’autres juridictions excède le montant total des préjudices ayant résulté, pour elle, de l’accident et des conditions de sa prise en charge par l’hôpital.

Il en résulte qu’il appartenait seulement à la cour d’allouer à Mme X la somme due par le centre hospitalier d’Annecy dans la limite de la part de son préjudice global qui n’avait pas été couverte par les sommes allouées par le juge judiciaire, la cour administrative d’appel a commis une erreur de droit et l’arrêt est annulé par le Conseil d’État.

CE, 5ème et 6ème Chambres réunies, 27 décembre 2021, 435632

Lien de causalité entre vaccination contre l’hépatite B et aggravation d’une affection préexistante

La circonstance qu’une personne ayant manifesté des symptômes d’une sclérose latérale amyotrophique (SLA ou maladie de Charcot) antérieurement à la vaccination contre l’hépatite B qu’elle a reçue n’exclut pas que la vaccination ait pu avoir un effet dommageable en contribuant à aggraver cette affection

Note concernant l’arrêt CE, 5ème ch, 18 octobre 2017, n° 400000, à lire dans la Gazette du Palais spécialisée en droit du dommage corporel n°04 du 30 janvier 2018